Scène primitive | Naissance et métamorphose

Scène Web

Vers la transparence d’un 5ème mur | Objectif NU(L)

Je me mets en ligne comme un amas de cellules retourne à la terre puis un jour à l’espace. Voilà tout le fond de mon geste artistique. Sans plus.

C’est cette unique activité de construction et destruction simultanée et spontanée qui m’occupe et m’intéresse. Elle résume l’entièreté de mes liens au monde. Elle synthétise ma vision et mon goût pour ce que doit être une création artistique non volontaire, dénuée du souci néfaste d’apparente cohérence. Néanmoins, partout dans les replis de ses liens, siège le maillage d’une harmonie toute organique. C’est en ce sens que le Web est un espace qui me parle au même titre que le plateau de théâtre.

Tout le reste est déjà là ou arrive à son heure

Cellules souches | Scène primitive imaginaire | Dessin numérique © David Noir
Cellules souches | Scène primitive imaginaire | Dessin numérique © David Noir

De la scène de théâtre à Internet

 

L’image-écran de la virtualité de nos pensées

Ce n’est pas nécessairement pour son aspect publicitaire ou par la diffusion de captations vidéo qu’Internet m’apparait comme un allié possible de la scène vivante. C’est bien en tant que nouvelle extension de sens pour des formes théâtrales contemporaines. Elles restent à inventer et il ne faut pas nécessairement les imaginer en tant qu’héritières directes de la scène telle que nous la connaissons.

Par-delà le virtuel 4ème mur si souvent traversé depuis des décennies, les artistes concepteurs cherchent à faire échapper leurs œuvres aux limites des plateaux. La tentaculaire configuration du Web, inspirée de nos modes de pensée cognitive, leur offre aujourd’hui une structure propre à supporter de nouvelles formes d’écritures. Davantage qu’un terrain de jeu, c’est un moule en creux apte à recevoir une incarnation différente des principes du théâtre et plus largement, de la scène vivante.

Il s’agit d’élargir le plateau à la Toile.

L’opposition entre la consultation de pages derrière son ordinateur et une présence réelle dans une salle est illusoire. L’internaute est tout autant un spectateur que l’individu parfois venu se vautrer dans un fauteuil, les yeux mi-clos. Il l’est peut-être même plus, par sa volonté propre de lire, regarder, entendre et cliquer sur des liens en direction de ce qui l’intéresse. L’art du surf sur Internet est aussi éphémère que l’instantanéité de la représentation, mais le spectateur y est autrement actif. Il faut dire que le spectacle véritable qui l’absorbe est celui de l’écran. Un écran spécial, qui n’a rien à voir avec celui du cinéma. Non, un écran qui danse et scintille par sa composition même faite de pixels.

Web errance

Nos écrans sont luminescent avant toute chose. Il n’attendent pas après une image projetée pour exprimer leur présence. Là où l’écran de cinéma se veut simple support blanc prompt à s’effacer et se faire oublier, nos surfaces numériques résonnent d’elles-mêmes sans discontinuer. C’était bien-sûr déjà le cas pour les tubes cathodiques de nos anciens téléviseurs dont la neige opérait à elle seule toute une fascination. J’aurais même tendance à penser que le programme diffusé servait d’habillage à ce pouvoir sans borne d’un flux qui scintille. Ainsi la barque que l’on croit regarder passer révèle avant tout la rivière qui la porte.

 

Internet peut constituer un véritable prolongement de la scène

La frontière, l’interface dirait-on aujourd’hui, est la seule chose qui se travaille véritablement. Dans la vie, on appelle souvent ça la relation. Au théâtre ou en direct, selon les modes de transmissions, c’est la corde vibrante la plus décisive pour donner le ton. Tout le reste est déjà là bien en amont dans la constitution propre de l’individu ou arrive à son heure, par la rencontre d’une idée, d’une sensation ou de certains de ses semblables. La soupe primitive de laquelle nous sommes issus forme toujours en nous le décor et la scène.

En plongée dans les méandres de la scène

A travers ce site, j’expérimente une autre version de l’immédiateté de l’instant vécu, par hasard partagé. Plonger. Sortir. Replonger. Ressortir… et à chaque retour sur la berge, après dissolution, on estime à partir de ses cellules souches, la repousse progressives de ses nouveaux membres articulés. C’est le mouvement de l’évolution en marche depuis le magma premier, incessamment rejoué. Archaïsme et modernité nous tiennent par la main pour que se lisse et respire sans se déshydrater notre neuve peau d’amphibien.