Mesdames, Messieurs, suite à un mouvement de grève d’une certaine catégorie d’un genre personnel, nous ne sommes pas en mesure de vous présenter le programme prévu.
Veuillez nous excuser pour le gène occasionné.
Comme les enfants morts nés d’une poche trop serrée
Comme les chats sans regard sous un plastique noué
Comme le papier se gaufre
Comme l’éléphant se vautre
Dans tabou redouté
Je ne suis pas la monstruosité annoncée
Je suis un homme
Garçon
Je suis un être humain
Je ne fais pas trop de chichis, de manières de mon corps exquis,
De pas maint’nant, de je t’en prie
Tu vois là, à présent, je suis plus belle que toi.
Je me sens étranglement bien,
Voluptueusement pachydermique derrière la barri-crade de mes défenses empiriques
C’est le matin, j’ai froid
Débarrassé de l’urgence de saisir ta croupe, je m’auto suffis par essence
Plaie mobile, je saigne et pourtant je survis, vie, vie, vidéo
Je dois saisir mon appareil photo
Sculpter ce safari à mes oreilles frémissantes
Je m’imprime en 3 D la mélopée de mes cris de brousse
Je cherche désormais d’où suintent mes humeurs,
Tu vois, je pleure
Mais quelle horreur est-il ?
Sois gentil, dis-le moi car moi, je ne sens plus rien là
Plus rien pour me soulever le cœur
Comme le papier qui se gaufre
Comme l’éléphant qui se vautre
Dans tabou
J’aime le blazer désabusé qui épaule ma masculinité depuis l’orphelinat
Je suis homme
Je suis un être humain
Je suis virilité mais je manque de bras pour battre l’air autour de moi
J’ai ma queue comme chasse-mouches
Par mon appendice je m’accroche à vos bouches
Suprême collage génétique
Je trompe ainsi mon bon public
Ne reste donc pas bouche bée,
On n’admire pas les éléphants si on n’accepte pas les noirs
J’ croyais qu’ t’avais compris Babar
Salope !
Le mot salope est tempétueux.
Il excite, au rythme des passions phalliques,
Salope, celui et celle qui ne demande qu’à jouir
Aime à jouir, ne cache pas son plaisir
À quatre pattes salope !
Ton fantasme va plus loin que ça
Au-delà des mots, salope !
Rêve d’une vulve endiablée,
Salope, étonnante beauté,
Pourquoi l’humilié fait vibrer ?
Mais qui baise-t-on au fond de ces contrées ?
La honte visse son trophée dans le mur de ma fébrilité
Chasse, accours, viens jusqu’à moi
Je ne connais pas ces gens qui courent, fêtards
Je ne connais que leurs avatars
J’aime le blaser respectable qui m’épaule tout au long des couloirs où je retrouve les miens pour boire
Bien élevé, moi je vis comme un homme véritable
Les beaux mensonges sont bannis de ma vie raisonnable
Bobard hait la vieille dame aux genoux cagneux qui supplie : « Caresse mes cuisses déformées je t’en prie»
Eh les fentes manichéennes, il est trop tard pour m’aimer, vilaines,
Pour accueillir en noir et blanc le turgescent tourment de ma peine
Remontée en substance de la semence de mon cerveau reptilien à hauteur de mon néocortex.
Retour primitif à mes vrais instincts qui eux seuls me veulent du bien.
Oui, en vérité je vous le dis, tout pouvoir est un abus
Tout effort de conviction, un viol avec pénétration.
Tu es prise au piège de mon foutre gluant, salope !
Ainsi les braconniers violents se sont soulagés dans ma chair jusqu’en dessous de ma peau épaisse
Dans la viande de ma viande, sous la rugueuse vigueur de mes fesses
Sans défense des barricades, je ne donne pas cher de la dépouille de nous autres dilettantes sexuels
J’urine à profusion sur vos simagrées de dévotion, de séduction
J’éventre le premier qui doute et même si j’en meurs empoisonné, je broute le textile des nations
Le voile me donne des vapeurs, laïques et obligatoires.
Tant pis, mon pied imposant, racorni te servira de porte parapluie.
Bientôt, nous irons nous coucher dans les cimetières d’en haut,
La connaissance est un fardeau
Il est temps de mourir idiot.
Les pénétrables sont aujourd’hui en élevage.
Les humains, qu’ils soient noirs, blancs, jaunes, élèvent le soumis comme les fourmis le font des pucerons.
Comme les fourmis le font des pucerons.
Homme trop petit pour m’étreindre, je t’écris des mots simples pour qu’ils puissent entrer dans ta trogne.
Monstre heureux je ne suis pas comme toi car je me fous des choix qu’il faut faire pour mon bien.
Je fais avec mon handicap. Ç’eut pu être pire face aux chasseurs d’ivoire et d’ébène noir, qui débordent.
Humain, erreur du petit « a » jusqu’au grand « Z », tu t’es trompé de horde
Je te vois, jeune, filou, lointain, narcisse affamé de chair, lécher les bottes des puissants.
Je ne peux pas vouloir ta mort pourtant, mais ton espèce m’a m’oublié
Toi, tu me trahis, moi qui t’aimais, charmant.
Artifices et dégénérescences sociales résonnent dans ton coeur.
Tu pourris ma nature, adulte avide de vaincre et tu nuis à ceux de ma race.
Être un homme, ce n’est pas toi et ta vie affairée.
Adulte, tu es enfant mal vieilli en panique à l’idée de te voir soupçonné d’un geste irresponsable.
Éducateur, gouvernant, décideur, dirigeant, mâle aux convictions fallacieuses, femelle en quête de reconnaissance douteuse,
Tu n’es qu’une bouse avec un costume autour.
Puisqu’on en est là ensemble, dans ce capharnaüm des horreurs, accepte cependant ma poigne dégénérée et couchons-nous de bonne heure.
Demain nous irons nous promener dans ton monde, faire le tour du propriétaire où t’es rien.
Que dis-tu de ce cadavre mutilé sur le bas côté du chemin ? De ce cadavre au sourire exquis ?
Pardon si je fais de la poésie, mais la mienne ne peut orner ta bibliothèque en teck.
Il y a cette haine qui ne peut cesser de se dire, venue de mon tréfonds millénaire
Mais tout ça, quelque part, tu n’y peux plus rien.
Car il faut bien manger, il faut bien jouir et aimer,
Il faut bien enfanter, il faut bien faire carrière,
Il faut bien faire passer pour des aptitudes ses connaissances légères.
Il faut bien adhérer aux lois du genre et de l’espèce.
Il faut bien obéir à tout ça.
Même si tout nous blesse
MLF hante encore ma nuque clairsemée, même si je ne crois guère pouvoir finir qu’empaillé par ces dames bien intentionnées
Aujourd’hui je vous invite toutes et tous à la ruine de mon biotope
Pour toujours et à jamais, bien solennellement devant vous, je marie la forêt
Retrait du masque. Visage affublé de prothèses.
Bonjour, bonjour les p’tits éléphants !
Alors comment ça va ce soir ?
Chanson live
« Au printemps, au printemps, au printemps j’aurai 16 ans … »
Au Printemps – Marie Laforêt (1969) – Pierre Cour, André Popp
Mesdames, Messieurs, suite à un mouvement de grève d’une certaine catégorie d’un genre très personnel, nous ne sommes pas en mesure de vous présenter le programme prévu.
Veuillez nous excuser pour le gène occasionné.
Texte et voix © David Noir 2014
Durée : 16'34