Moi, je passe mes nuits à l’abri. De tout. A l’abri de toi, malgré ta voix suavement moelleusement gravement radiophonique, hygiénique et concernée. Tu m’ennuies tellement, comédien de culture, avec ta sensibilité trop placée, déplacée, mal placée. Vive les ordinateurs et les voix synthétiques. Pitié ! Pitié ! Vite ! Vite ce monde de cybernautes que l’on nous promet depuis si longtemps. Comme il tarde à venir.
La joie des enfants boueux n’a pas d’avenir. C’est ça l’insupportable dans la tête de celui qui succombe au temps. Je n’ai rien appris alors ? Je me préoccupe surtout de faire en sorte de ne pas être un sous-produit. Heureusement le mimétisme n’est pas total. Il s’arrête là. Mon insertion sociale se cantonne à la portion congrue. Alors, place ! Et phrase après phrase, s’il vous plait. Mot à mot, un pied devant l’autre, je marche dans les traces de mes propres pas. Direction : retour à l’authentique après un trop long et vaste détour par vos contrées de bêtise invétérée, de mensonges d’invertébrés. Chaque phrase se suffit à elle-même et me plait ainsi en soi. Nul besoin qu’elle s’environne de verbiage si elle recèle assez de puissance poétique pour suffire au plaisir de l’avoir en tête ou de la lire. N’aie crainte lecteur, lectrice ; je me parle à moi-même. Tu sais, il faut être libre de ses amours ; totalement libre de suivre ses penchants et les sentiments de son cœur, les pulsions de son corps, libre de les vivre pour peu qu’elles semblent justes. La liberté d’expression est de surface. La liberté d’agir pareillement. Dans un cas ce sont les mots qui culturellement nous limitent, dans l’autre, c’est notre corps, naturellement, qui est la barrière de notre retenue, infranchissable. Seul penser me donne accès à l’infini des chemins. Peu m’importe qu’ils soient balisés car leur dessin trace le plan de ma constitution même. L’unique construction dont je puis finalement devenir maître et auteur. Je suis ma pensée. Nul besoin d’un conjonction entre être et penser. Je suis maître en mon cerveau, je suis roi en ma demeure. Voilà le sens d’une vie et le Graal de la mienne. Nul ne peut m’enlever ma nuit et mes réveils pleins et heureux. Peu importe le support, la poésie est là. Seul importe de trouver le substrat qui favorisera son développement sans obligation d’harmonie, sa diffusion optimale en paiement d’un effort enfin devenu rentable.